Gagner : une lecture radicalement différente
La société française a un rapport au travail qui a été fortement inspiré par son histoire, et notamment l’influence de la religion.
Qui, lorsqu’on lui parle de travail, n’a pas en tête, plus ou moins consciemment, “tu gagneras ton pain à la sueur de ton front”.
Or, c’est une erreur de traduction autant qu’une méconnaissance historique profonde qu’une lecture radicale – au sens étymologique de racine – permet de ré-ecrire au 21ème siécle.
Le passage vient de la Genèse 3:19, après la Chute d’Adam et Ève. Le verset en hébreu – בְּזֵעַ֣ת אַפֶּ֔יךָ תֹּֽאכַל־לֶ֖חֶם be-ze‘at ’appekha to’khal leḥem – a pour traduction littérale : « À la sueur de ton visage, tu mangeras du pain”.
Nos connaissances archéologiques et anthropologique nous permettent désormais d’affirmer avec certitude – plus qu’avec une croyance infondée – que nos ancêtres sont bel et bien restés dans le paradis, avec une abondance réelle dans le monde des chasseurs cueilleurs, et ce pendant des millénaires (leur dentition démontre une alimentation plus riche et variée que les périodes suivantes d’agriculture intensive). De plus, l’agriculture qui était majoritairement un rapport des femmes à la terre-mère a été pendant longtemps facile, dans une relation apaisée à une nature généreuse (contrairement à ce qu’invoquait l’ancien testament).
Bref, la conception de labeur est fausse, tout comme la malédiction associée, comme nous le constatons en explorant des cultures différentes, amérindiennes, protestante…
Le “travail” semble plutôt depuis bientôt une centaine d’année est une forme d’émancipation et d’expression unique dans l’histoire de l’humanité.
Sources : David Graeber, David Wengrow & Marshall Sahlins

